INTERVIEW - Troubles du sommeil : comment mon pharmacien peut m'aider?
Vous avez du mal à vous endormir ? Vous plongez du nez devant la télé et vous réveillez au milieu de la nuit ? Vous avez le sentiment d’avoir déjà tout essayé ? Anne Vandegaart, pharmacienne chez Multipharma, partage son expertise sur les troubles du sommeil et offre des conseils pratiques pour améliorer la qualité du repos nocturne.
Avez-vous beaucoup de patients affectés par les troubles du sommeil ?
Oui, c’est un problème fréquent. Beaucoup de patients viennent se plaindre en pharmacie, à la recherche d’une solution pour leurs troubles du sommeil. La demande persiste toute l’année, même si nous observons une légère diminution pendant la période estivale.
Quelle est la demande la plus fréquente ?
Tout simplement, « Vous auriez quelque chose qui pourrait m’aider à dormir ? ». C’est compliqué de répondre à cette question parce que les plantes dont nous disposons sans prescription médicale ont chacune leurs propriétés. Nous avons donc besoin d’en savoir plus avant de proposer un traitement adapté à leur trouble du sommeil.
Le trouble de sommeil le plus classique ?
Il n’y a pas de généralité. Chaque individu présente des symptômes uniques. Cela dit, on observe souvent un cercle vicieux où l’on accumule de la fatigue. Les gens sont tellement fatigués qu’ils s’effondrent avant l’heure du coucher, se réveillent vers 4-5 heures du matin et n’arrivent plus à se rendormir. On se trouve alors avec des problèmes de décalage du cycle du sommeil.
Quels conseils donnez-vous aux personnes qui se plaignent de troubles du sommeil ?
Mais bon, la plupart des personnes qui viennent en officine ont déjà fait des recherches pour améliorer la qualité de leur sommeil et n’ont pas réussi. Ils cherchent une autre aide. Il faut avouer que pour les mettre en pratique, quand on a une vie active, qu’on est jeune parent, c’est compliqué. Ce qui est certain, c’est qu’un bon sommeil, ça se prépare tout au long de la journée. On évite de trop s’exposer à la lumière bleue venant des écrans et on recherche au maximum la lumière du jour pour activer la mélatonine, l’hormone qui régule le rythme jour-nuit. Il faut aussi avoir une activité physique suffisante pour se fatiguer et avoir besoin de repos.
À quoi êtes-vous attentive quand un patient se plaint de mal dormir ?
Il faut aborder le problème du trouble du sommeil dans sa globalité. Détecter s’il y a des éventuels problèmes extérieurs qui pourraient être présents comme du bruit, un inconfort dans le lit. Avant de conseiller un traitement, notre rôle est de vérifier si le patient ne souffre pas de douleurs, de crampes, de problèmes respiratoires comme le nez bouché, l’asthme ou l’apnée du sommeil. La prise de certains médicaments comme les hormones thyroïdiennes ou la cortisone peuvent également perturber le cycle du sommeil. Il faut s’assurer qu’ils sont pris au bon moment de la journée. Certains antidépresseurs peuvent aussi provoquer des cauchemars et perturber le sommeil. On renvoie alors le patient vers son médecin pour voir s’il ne peut pas réduire la dose ou changer de classe médicamenteuse.
Quelle solution naturelle proposez-vous en officine ?
En tant que pharmacien, on propose des synergies de plantes qui ont une action à large spectre de manière à couvrir tous les troubles du sommeil, que ce soit les problèmes d’endormissement ou de réveil précoce. On conseille généralement des formules enrichies en mélatonine et en magnésium. J’insiste toujours sur le fait qu’il faut être patient. Les solutions naturelles demandent du temps pour agir. Non seulement en nombre de jours de prise, mais aussi entre le moment de prise et l’effet qu’elles vont procurer. Ce sont des plantes, pas une pilule magique qui agit comme un bouton « on-off » sur le sommeil.
Que proposez-vous aux patients qui demandent des somnifères ?
Les somnifères ne sont pas la première option. Ils entraînent notamment des phénomènes d’accoutumance et de somnolence qui peuvent entraîner des risques d’accident pendant la journée. Avant de les renvoyer chez leur médecin pour une prescription médicale, on propose une solution intermédiaire, entre les plantes, la mélatonine et les benzodiazépines : les médicaments histaminiques H1. Même s’ils ne nécessitent pas d’ordonnance médicale, nous ne les recommandons que pour une courte période parce qu’ils peuvent provoquer des effets indésirables très importants (sédation pendant la journée, confusion, rétention urinaire, problèmes digestifs).
Comment aider les patients qui veulent se libérer des somnifères ?
Il ne faut surtout pas arrêter brutalement un produit pris depuis une longue période. Le médecin établit un plan de sevrage sur le long terme pour diminuer progressivement les doses, par période d’une semaine ou de 15 jours. Il existe depuis peu un programme de benzodiazépine pris en charge par la mutuelle. Ce programme consiste en une préparation magistrale que le pharmacien effectue sur ordonnance du médecin. Les gélules préparées par le pharmacien pour diminuer la dose sont gratuites.
C’est normal de moins dormir avec l’âge ?
Tout à fait. Avec l’âge, le nombre d’heures de repos nécessaires diminue. Malheureusement, bon nombre de personnes âgées trouvent refuge dans le sommeil parce qu’elles ont moins de sollicitations dans la journée. Elles vont parfois se coucher trop tôt, pour que le temps passe plus vite, et voudraient des nuits de 12 heures, ce qui est malheureusement impossible. C’est difficile de leur faire comprendre que 6-8 heures de sommeil, c’est suffisant pour la plupart des gens. Surtout si elles ont fait une longue sieste durant la journée.
Quels conseils donner aux personnes qui dorment trop en journée?
Essayer de lutter contre le sommeil en se forçant à sortir par exemple, ou en ayant une autre activité que de rester dans son fauteuil. L’idée est de préserver son capital sommeil pour la nuit, pour ne pas être en décalage. Si on veut faire une sieste malgré tout, elle doit être la plus brève possible, maximum 20 minutes.
Lisez aussi nos autres articles consacrés aux troubles du sommeil :
Tout savoir sur le cycle du sommeil et les troubles du sommeil
Stress et sommeil : comment le stress peut affecter votre sommeil ?
Dépendance aux benzodiazépines et Z-drugs ?
Dossier
sur les Troubles du sommeil